Marcher… du Routeburn Track au Ben Lomond

Routeburn Track

La Nouvelle-Zélande et ses ondes magiques qui vous propulsent au bon endroit au bon moment… Encore et toujours. D’accord, j’avais besoin d’une pause dans mes voyages et je profitais de l’hospitalité formidable de mes amis kiwis à Invercargill pour me détendre et travailler sur quelques projets personnels. Mais quand même… Cela me titillait. Pendant mon année de Visa Vacances Travail en Nouvelle-Zélande, je n’avais pas pu faire le Routeburn Track, je l’avais repoussé, puis annulé, à cause du (très) mauvais temps. Un an plus tard, je l’avais toujours en travers de la gorge et cela me faisait comme de l’électricité dans les doigts de pieds (cette fille n’est pas normale…). De même pour le Ben Lomond, ce sommet qui s’élevait au-dessus de Queenstown, petite ville surpeuplée et sur-touristique, nichée dans un écrin de beauté naturelle, sur laquelle je me disais que je ferais mieux de prendre de la hauteur puisque j’avais du mal à apprécier pleinement me balader dans sa foule et entre tous ses prestataires d’activités plus « fun » et chères les unes que les autres… Et puis l’hiver approchait, il allait falloir se décider. Il y eut ce lundi soir où je regardai nonchalamment la météo et entendis les conseils en terme de camping de quelques voyageurs… Et il y eut le lendemain matin, quand je finis de préparer mon sac, sortis, tendis le pouce. C’était parti.

Route du Fiordland

Le Routeburn Track, comme la perfection

Après que la camionnette de Gary, adorable habitant du Southland avec qui j’avais longuement discuté de Doubtful Sound, se soit arrêtée sous la pluie à l’intersection pour Te Anau, je rencontrai John, et son camion chargé de bouteilles de gaz. Il m’annonça que le trajet serait un peu plus long car il devait livrer toutes ces bouteilles, mais qu’il allait bien à Te Anau. Tant mieux, car avec un personnage pareil le trajet parut finalement très rapide. Entre temps, John m’annonça qu’il devait se rendre à Milford Sound le lendemain matin et pourrait donc me déposer au Divide, le départ du Routeburn Track. Bon, bah, oui, d’accord ! Je vis tout cela comme un très bon signe et je commençai donc cette randonnée avec un grand sourire, malgré la bruine et le ciel gris.

Key Summit

Mon premier jour allait être très court, puisque j’avais prévu de marcher jusqu’au Lac Howden, en incluant le petit point de vue de Key Summit, qui ne m’offrit absolument aucunes vues mais des arbres et des marécages fantomatiques. Depuis cette toute première hut, il est possible de rejoindre le Greenstown Track et de marcher une vingtaine de minutes jusqu’à un camping gratuit. J’y arrivai la première et découvris une clairière calme et entourée de jolies vues sur les montagnes. Je passai une après-midi tranquille. Et plus l’heure avançait, plus le ciel se dégageait, offrant des coins de ciel bleu prometteurs pour le lendemain. Un groupe de randonneurs vint m’encercler assez étrangement de leurs tentes… Mais peu importe.

Camping, Routeburn Track

Je m’endormis tôt et me réveillai avec mon alarme, à 5 heures. Une heure plus tard, j’avais remballé ma tente dans le noir et marchais, la lampe frontale en action. Marcher dans le noir, dans le silence le plus complet, être la première de la journée sur ce chemin… J’étais toute heureuse de retrouver cette sensation que j’aimais tant. Puis les premières lueurs arrivèrent avec douceur, entre des nuages bas et épais. Les oiseaux se mirent à chantonner ici et là. Et c’est comme si soudainement, je me réveillai d’un état un peu alternatif, et me trouvai au pied d’une cascade absolument immense, puissante, me projetant insolemment ses gouttes froides. Earland Falls, 174 mètres, disait le panneau. Good morning. Je souris, respirai, m’imprégnai de ce vacarme et de la fraîcheur du lieu, puis avançai. En quelques pas, le bruit de l’eau avait disparu, mangé par la forêt épaisse et intime.

Earland Falls

Cascade sur le Routeburn Track

Je pus revoir la jolie cascade au loin, alors que j’avançais sur le versant d’en face. Et alors que les paysages s’éclaircissaient peu à peu, j’arrivai au très fameux Lac Mackenzie. Je m’éloignai du groupe de randonneurs et m’assis sur une pierre, pour une pause et un sandwich. J’attendis. Quelque chose me disait d’attendre. Et puis j’étais si bien face à ce lac, si paisible. Et le spectacle commença. Quelques rayons qui percèrent les nuages d’abord. Puis d’autres, de moins en moins timides, dévoilant des reflets dans les eaux claires, aux nuances vertes et laiteuses, de ce lac somptueux. Mon coeur commença à bondir comme un fou, semblant me dire, merci merci merci d’être revenue en Nouvelle-Zélande, c’est de ces émotions-là dont j’ai besoin. Alors je montai cette longue côte qui paraissait n’arriver que dans un tas de nuages cotonneux. J’étais légère et confiante. Je regardais ces nuages en sachant qu’ils allaient se lever pour me laisser passer au sec. Ce qu’il firent. Et le soleil de m’inonder de chaleur.

Reflets du lac Mackenzie

Lac Mackenzie vu d'en haut

D’en haut, le Lac Mackenzie n’en finissait pas d’être resplendissant, et je n’en finissais pas de prendre cinquante fois la même photo. Jusqu’au tournant, jusqu’à changer de vue avant d’avoir eu le temps d’être lassée. Jusqu’à découvrir la vallée extraordinaire qui se dévoilait sur des kilomètres, et les quelques pointes enneigées. J’avançais, toujours plus haut, depuis déjà plus de six heures, et je commençais à sentir mon dos et mes jambes réclamer une pause. Mais les vues étaient trop somptueuses et le climat trop délicieux, trop parfait, avec cette minuscule brise trop agréable pour être confondue avec du vent, ce soleil chaleureux mais pas réellement chaud, juste suffisant pour marcher en t-shirt.

Routeburn Track

Je posai mon sac devant l’abris de Harris Saddle, mangeai du chocolat, oui oui, et respirai quelques minutes, plus que satisfaite par mon heure d’arrivée au Saddle par rapport à mes prévisions, sans avoir eu l’impression de me dépêcher. Le débat était clos, j’allais donc ajouter le petit sommet de Conical Hill pour monter encore un peu plus haut et avoir des vues à 360°. Est-ce que cela en valait la peine ? Euh… Oui, évidemment. Sublime, encore encore encore. Une dose de Nouvelle-Zélande dans le coeur et dans le corps.

Harris Saddle

Conical Hill

Ensuite, la joie de savoir que le reste de la marche allait être de la descente. Les vues étaient à nouveau différentes puisque j’avançais à présent vers l’autre extrémité du Routeburn Track, qui se termine près de Glenorchy et de Queenstown. Encore des monts et merveilles, encore des lacs, encore des rivières, encore des pics abruptes et des vallées étroites.

Vallée sur le Routeburn Track

Descente vers Glenorchy

J’arrivais vers 17 heures au tout dernier camping de la randonnée, où j’avais pu réserver un emplacement. J’avais 27 km dans les pattes, un bon 700 mètres de dénivelé positif et puis négatif, et devant moi se dressait un emplacement de camping de rêve. Ma tente dressée, je mangeai face au charme incommensurable de cet endroit. Je n’avais clairement pas passé une journée aussi parfaite depuis très longtemps, et la joie que cela me procurait me fit très probablement m’endormir dans mon cocon avec un sourire sur les lèvres.

Camping

Le lendemain, je pris mon petit-déjeuner devant un levé de soleil tout violet dans les nuages, à peine surprise par ce nouveau ravissement, puis je me mis en marche pour les deux dernières petite heures de descente jusqu’au parking, d’où un petit bus me permit de rejoindre Queenstown.

Levé de soleil violet

Ben Lomond, au-dessus de Queenstown et du Lac Wakatipu

J’avais pensé enchaîner sur la montée du Ben Lomond dans l’après-midi même. Mais j’en avais quand même un peu plein les jambes et le dos, et le ciel s’était couvert. Alors je laissai passer l’après-midi en mangeant une glace chez Patagonia (pour moi la meilleure dépense à faire à Queenstown et une vraie bonne raison de s’y rendre), puis le lendemain en faisant à peu près la même chose.

Queenstown

Le dimanche au matin, je pris le premier bus depuis Arrowtown où je logeais, et me rendis au pied du Ben Lomond sous la pleine lune et les étoiles. Pour être très sincère, j’avais la tête chargée de ces souvenirs et de ces pensées qui parfois rendent les journées difficiles à entamer. Cela nous arrive à tous je suppose. Mais je marchais, je montais, j’avais 1500 mètres de dénivelé qui m’attendaient, et j’écrasais mes peines presque rageusement sur les racines de la forêt à travers laquelle je commençais cette ascension. Même pas mal.

Début de la randonnée

Et puis, et puis, et puis… Rien ne peut désarmer plus que la magie des premiers rayons du soleil sur un paysage féérique, entre les sapins, sur les eaux calme du Lac Wakatipu, sur les maisons de Queenstown encore engourdies de leur samedi soir festif. Je me pris la douceur du soleil de face et m’arrêtai net, savourant ce câlin d’une valeur inestimable. Je poursuivis mon ascension.

Queenstown le matin

J’avais faim et j’avais envie de m’arrêter. Je ne le fis pas, sauf pour quelques photos et quelques bouffées d’air. Puis j’arrivai en haut, un sourire immense sur mon visage, et toute mon amertume du matin envolée. Je fus rejointe par les autres courageux du jour et nous partageâmes les vues enivrantes sur ce lac et ces sommets, en grignotant des abricots secs.

Sommet du Ben Lomond

Je redescendis en trottinant, bien contente de n’avoir pas attendu plus longuement pour commencer ce matin-là, tant le nombre de personnes qui entamaient l’ascension était impressionnant, certains arborant un visage déconfit du pire jour de leur vie qui me donna très envie de rire… Non, je n’avais pas vraiment envie de plaindre ces pauvres bougres ayant la chance infinie de se trouver là, bien vivants, à monter le Ben Lomond en ce premier jour d’avril 2018, sous un temps radieux.

Ben Lomond

Après une énième glace chez Patagonia, je constatai que les nuages avaient pris possession du ciel… Comment avais-je pu être si chanceuse tout au long de cette semaine magnifique ? Je finis par une petite marche sur les hauteurs d’Arrowtown, Tobins Track, pour clôturer ce séjour.

Fougères et petit oiseau

J’avais retrouvé la Nouvelle-Zélande. J’avais retrouvé le souvenir de ces sensations incomparables offertes par les randonnées de ce pays. Je m’étais retrouvée aussi, apparemment.

Je vous laisse profiter des photos de cet album en suivant ce lien. A bientôt pour une destination plus… tropicale !

Rivière sur le Routeburn Track

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Ile du Sud

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